Les marchés quasi monopolistiques et leurs effets négatifs sur la croissance de certaines catégories
- bertranddufour58
- 31 juil. 2023
- 5 min de lecture
16.02.2020
Nous aimons tous les Grandes Marques. Celles qui ont bercé notre enfance, nos jeunes années et jusqu’à aujourd’hui. Leur notoriété n’est plus à faire, même si de leur côté, un maintien en terme de communication reste obligatoire pour rester en Top of mind. Etre Leader implique des investissements média importants car le consommateur n’est plus aveuglément fidèle comme avant. L’a-t-il déjà été ou n’avait-il simplement pas le choix ?
Nous comprenons néanmoins donc parfaitement la volonté des distributeurs de proposer au moins ces marques. Il est clair que s’en priver équivaudrait à se couper de pans entier de clients dans un grande majorité restés fidèles - par défaut.
Mais certaines catégories, au hasard, les épices, mon sujet préféré - et aussi mon produit favori - souffrent du manque de renouvellement de l’offre, et gagneraient à laisser jouer la concurrence et la différentiation. Certes on peut avancer que l’offre du leader est large, l’image bien française et la qualité est de bon niveau. D’autre part le consommateur n’est pas un expert de cette catégorie et par conséquent on ne voit donc pas d’un premier abord, pourquoi les distributeurs pourraient vouloir changer.
C’est pourquoi il est à mon avis intéressant de creuser les chiffres du marché et les tendances consommateurs, qui sont, après tout, les acheteurs de ces produits. C’est pour moi l’occasion de revenir sur 2019, très rapidement:
Le P13 de Nielsen (année complète 2019) indique les données suivantes :
Croissance marché épices P13 : +1,2% valeur et +2% volume
Leader en baisse - 1,9% valeur
FUCHS +34,9% valeur (depuis 2 ans consécutifs)
Nos deux autres marques BioWagner (72 références et No2 du marché) et Columbia (premier prix et gros volumes) se portent également plutôt bien :
BioWagner +51,7%
Columbia +175,2%
La décroissance du Leader de la catégorie depuis plusieurs années n’est pas enrayée par sa croissance importante en gamme Bio. Comment lire ces chiffres ? Le Leader pèse près de 56% de part de marché, mais sa part de linéaire est bien supérieure à sa PDM valeur, et bien souvent, en format SM, le Leader à 100% de part de linéaire (2 meubles).
La création récente de la part du Leader d’un nouveau meuble plus qualitatif qui couvre sans pouvoir le scinder presque 3 racks d’un coup, procède d’une volonté de rester sur place sans se faire évincer, quitte à continuer à entrainer le marché des épices dans sa stagnation actuelle, voire sa décroissance. Nous pouvons penser que ce nouveau meuble vient en réaction peut-être à FUCHS qui propose de véritables meubles en bois avec tiroirs senteurs et vitrines éclairées. Si cela est la cas, c’est déjà un effet bénéfique de la concurrence pour les consommateurs!
Sans FUCHS, le marché des épices en France depuis 2 ans ne serait en effet pas à +1,2% en valeur, mais entre 0% et +0,4%. En effet, notre croissance 2019 vs 2018 et 2018 vs 2017 correspond pratiquement à l’intégralité de la baisse de Leader de la catégorie. Nous pourrions en être satisfaits, mais nous ne nous réjouissons pas du malheur des autres, surtout quand cela contribue à la stagnation du marché. Celle-ci participe n'aide pas à renouveler l'intérêt de la GMS pour ce rayon. Alors l’important est de comprendre pourquoi le marché des épices se développe (ou stagne moins) grâce aux nouveaux venus tels que FUCHS. La réponse est toujours à rechercher du côté des consommateurs, et les réponses qu’ils souhaitent trouver dans leur points de vente préférés ;
La marque leader est, il faut le dire, une belle marque - anciennement française maintenant malheureusement passée dans le giron de l’Américain McCormick - elle est positionnée en milieu de gamme. Elle a connu ses beaux jours quand le marché et les consommateurs formaient un bloc très homogène et qu’il n’y avait qu’elle. Elle inspire confiance, et est devenu quasiment « générique ». On n'achète pas des épices, mais du « Marque Leader ». Frigidaire, Scotch, ces marques omniprésentes sont inscrites dans les esprits des plus de 45 ans et ces clients restent fidèles.
Malheureusement, cela a aussi contribué à transformer les épices, siège de l’imaginaire de la gastronomie et des émotions pour presque l’ensemble des cultures, en commodité de base, que l’on achète 2 ou 3 fois par an. Les statistiques parlent d’elles-mêmes: 2,5 fois par an et par personne en France en 2016. C'est le cas en France, pays pourtant connu il me semble pour une certaine culture gastronomique. Les épices n’ont ainsi depuis 15 ans absolument pas connu le développement du rayon café (toute proportions gardées) ou du vin et pourtant il y du potentiel de croissance. Mais il n’y a simplement pas assez de place en rayon pour la concurrence.
Entre parenthèse, soulignons que les catégories où les MN ont le moins de légitimité palpable par les consommateurs et où l'on observe de la perte de valeur depuis des années sont les plus sujettes à se voir remplacer par - d'aussi belles, voire plus - MDD.
Mais revenons aux marques. Que se passe-t-il pour les autres générations, aujourd’hui qui plus est très segmentées, et qui n’ont pas été exposées au monopole de certains marques et en l’occurrence du Leader de la catégorie épices? Ces populations sont parfaitement insensibles au milieu de gamme et ont tendance à fuir les marques qui ont accompagné leur parents et grands-parents. Elles sont autonomes dans leurs choix. Elles recherchent justement autre chose, une part de rêve, d’imaginaire, de nouveaux packaging, de nouveaux meubles, de nouvelles saveurs. La dernière communication d' ALDI montre bien à quel point cet aspect des choses vient d'être compris.
FUCHS est au demeurant justement positionnée de manière transversale, nous parlons en effet aux esprits « indépendants » de tous les âges, qui aiment cuisiner et découvrir. Nous ne souhaitons pas cannibaliser le Leader, qui a sa clientèle, mais elle n’est plus l’unique clientèle potentielle! Nous ne donnons pas de leçons, nous sommes là pour ceux qui veulent autre chose. C'est notre POURQUOI: nous ne vendons pas des épices, nous vendons de l'émotion en flacons.
Ces consommateurs, plus indépendants, peuvent bien sûr acheter en ligne s’ils ne trouvent pas l’offre en rayon : nous avons par exemple réalisé la moitié du CA du Leader sur Vente Privée sur 10 jours il y a 2 ans alors que nous étions parfaitement inconnus en France...
Mais aussi et surtout ces consommateurs de moins de 45 ans achètent ou achèteront dans les points de vente qui sont en mesure de leur proposer « autre chose ». Depuis 2017, nous avons créé près de 1000 nouveaux magasins heureux de pouvoir proposer à leur clients de la nouveauté sans prendre de risque : le Groupe FUCHS est en effet spécialiste des épices depuis 1952 (création du Leader postérieure, en 1963); nos gammes Bio ont 40 ans, nos concurrents: à peine plus d’un an.
Notre traçabilité est totale, nos packaging originaux, nos meubles quasiment sur mesure. Aujourd’hui, notre croissance permet d’enrayer la chute du marché total. Demain, nous voulons, en partenariat avec les distributeurs, participer à faire grandir la taille du marché (en France 300 millions euros, en Allemagne 600 millions) plutôt qu’à prendre des parts de marché à nos concurrents.
Les épices sont un véritable pôle de différentiation et d’attraction dans les PDV pour les enseignes. Pourquoi, à l’heure où la différentiation se veut être le moteur de la croissance ne pas agrandir ou repenser (raisonnablement car il fait rester rentable au m2), les rayons épices et reconnaître enfin que le marché des épices est pluriel et, comme toutes les autres catégories, parle à des segments clients différents? Pourquoi ne conserver souvent que la marque Leader qui ne génère plus la croissance qu'elle a connu par le passé?
C’est pourquoi nous proposons au marché et sommes fiers, avec la marque FUCHS et nos autres marques, de participer au développement du CA et marges des distributeurs en donnant une raison supplémentaire à leur clients fidèles de continuer à acheter des épices mais en faisant croître leur panier moyen et aussi d’apporter de nouveaux acheteurs.
Il est important pas conséquent de remettre en cause les monopoles et de laisser les nouveaux entrants participer à la croissance. Tous les intervenants vont en bénéficier, mais avant tout, le consommateur.
Avec FUCHS, Osez le Goût Véritable.
Bertrand Dufour
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